Le numérique, parmi les priorités de la présidence française à l'Union Européenne : colloque organisé par la CSNP sous ma présidence.
Les défis économiques et l’équilibre entre liberté d’expression et régulation sont les deux principaux axes qui ont été abordés dans la conférence que j’ai eu le plaisir d’organiser en tant que présidente de la CSNP, dont le sujet était « les priorités de la Présidence française dans le domaine du numérique : Quels enjeux pour nos concitoyens et nos entreprises ? »
Monsieur Cédric O, secrétaire d’Etat chargé de la transition numérique et des communications électroniques, a rappelé ces deux axes soulevés par le numérique qui ont été évoqués par le Président de la République.
Dans le contexte géopolitique actuel, l’Europe doit pouvoir maintenir sa souveraineté aussi bien économique et technologique que politique. Nous pouvons nous rendre compte à quel point nous dépendons des outils numériques anglo-saxons dans notre vie quotidienne. D’où la nécessité de développer nos propres champions en faisant émerger des startups européennes capables d’inverser la tendance. Cet objectif nécessite trois choses : du capital, public et privé ; faire de l'Europe un pôle d'attractivité mondial en matière de talents (s’inspirant de la réussite américaine qui est largement fondée sur ses capacités d'attraction des talents dans le monde entier) ; un marché.
En matière d’équilibre entre la liberté d’expression et la régulation, le modèle européen doit promouvoir les valeurs de pluralisme, d'humanisme et de démocratie. Par essence le numérique est une technologie innovante qui était peu régulée et dont la philosophie est assez libertaire. Pourtant, la prolifération des fake news, de la cybercriminalité, des discours de haine, etc… menacent l'espace numérique et la pertinence des puissances publiques, d'où la nécessité d'une régulation adaptée. Le secrétaire d’Etat, Cédric O, a insisté sur les deux textes phares de cette régulation : le DMA et le DSA.
• Le DMA (Digital Markets Acts) est le texte le plus important de la régulation économique et de la politique de la concurrence. Les outils numériques que nous utilisons dans notre quotidien doivent être régulés en raison de leurs impacts sur l'innovation et sur notre liberté.
• Le DSA (Digital Services Acts) doit permettre de faire en sorte que nous protégions mieux les consommateurs européens. Il dispose que les très grands réseaux sociaux doivent être transparents dans leurs fonctionnements, il envisage également la question primordiale de la protection des consommateurs (Cédric O a par exemple rappelé la volonté de déréférencer la plateforme Wish, qui vendait des produits non conformes ou dangereux).
Cédric O a rappelé l'espoir de boucler ces deux textes importants, l'agenda de la Présidence française de l'Union Européenne pouvant donner l’occasion de se positionner sur le sujet. Pour reprendre les propos du Ministre, “le numérique est un grand défi mais aussi une opportunité pour l'Europe.”
S’en est suivie l’intervention de Monsieur Thibaut Kleiner, Directeur des réseaux de communications, contenus et technologies de la Commission Européenne.
Il a relevé la préoccupation concernant la protection des enfants en ligne et la protection de l'environnement. Il a également accordé une importance à l'identité numérique vérifiée. Notre identité sur les plateformes comme Facebook, Google ou Apple n'est pas toujours sécurisée, d'où la nécessité d'avoir une identité numérique européenne.
Selon lui la présidence française donne l'opportunité à de nombreuses propositions qui ont été faites d’aboutir et de mobiliser tous les outils de la Commission. Parmi lesquels les programmes de financement significatifs (par exemple Horizons Europe), et les propositions de politiques industrielles renforcées. Bruxelles a fait de nombreuses propositions législatives, non seulement pour développer notre marché intérieur mais aussi pour reconquérir notre souveraineté vis-à-vis des grandes plateformes américaines.
La conférence s’est poursuivie par une première table ronde durant laquelle les intervenants ont tentés de répondre à la question suivante : “Les attentes de la société civile et de l’écosystème du numérique sont-elles compatibles ?”.
Elle a débuté par le partage des inquiétudes selon lesquelles les actions concrètes et les moyens mis en œuvre par les acteurs institutionnels et économiques risqueraient de ne pas être à la hauteur des ambitions et des enjeux des textes régulateurs.
Les quatre enjeux de la PFUE ont été ensuite rappelés. A savoir :
- la nécessité d'intégrer les grands éditeurs de logiciel qui travaillent avec le CIGREF ou les nouveaux acteurs du cloud dans les “gatekeepers", les contrôleurs d'accès sur lesquels la réglementation va imposer un certain nombre de régulations.
- la protection des données dans le cloud.
- la sécurité numérique, via notamment un renforcement des moyens policiers, des moyens de justice et l'augmentation de la cyberdéfense européenne.
- l'impact du numérique sur l'environnement.
L’accent a été mis au passage sur la nécessité de la réindustrialisation des entreprises et des startups françaises, ainsi que sur l’importance de la formation dans les métiers du numérique.
L'ensemble des intervenants de la table-ronde partagent leur point de vue sur le rôle crucial et sur les enjeux des deux textes de régulation DMA et DSA, et sur le fait que les acteurs économiques, sociaux et la société civile sont une partie intégrante de l'écosystème numérique en Europe. Les défis restent quand même à surmonter, d'où la nécessité que les pouvoirs publics français et européens mettent en place des actions concrètes et efficaces.